Opération de Dupuytren : Les différentes options chirugicales
Si l'aponévrectomie reste l'opération de Dupuytren par excellence, les risques de raideur articulaire et de récidive sont à prendre en compte par le patient, quel que soit l'intervention chirurgicale privilégiée par le chirurgien.
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Le traitement chirurgical de Dupuytren : Les options possibles
Le principal objectif du traitement chirurgical de Dupuytren est d’empêcher l’installation progressive d’une rétraction digitale handicapante qui conditionne tout le pronostic au long cours de la maladie.
C’est essentiellement la difficulté qu’il y a à récupérer la souplesse des interphalangiennes qui sont à la longue responsable d’un enraidissement articulaire définitif du ou des doigts atteints qui se rétractent en crochet dans la paume. Cette rétraction digitale progressive est d’autant plus difficile à corriger et d’autant plus définitive que l’on prend du retard à la traiter.
La donnée essentielle à retenir de la maladie de Dupuytren est que l’opération d’une rétraction de la métacarpo-phalangienne (MP) par atteinte de Dupuytren à la paume de la main est simple et de bon pronostic. A l’inverse, la rétraction digitale des articulations interphalangiennes est problématique. Elle est à l’origine de tous les vrais problèmes provoquant un handicap et des séquelles sur le long terme.
Le problème de la raideur articulaire
Cette raideur articulaire devient une maladie autonome du doigt qui impose la réalisation d’une libération articulaire appelée arthrolyse qui est d’autant plus étendue que la rétraction est importante et ancienne. Ce type d’opération de Dupuytren lorsqu’il s’impose provoque une agression articulaire source de douleurs, de gonflement et de rétraction fibreuse cicatricielle. Cette rétraction au niveau des cicatrices peut faire perdre tout le bénéfice de l’intervention chirurgicale quant au gain d’extension des doigts. Elle rend les suites opératoires plus complexes.
En pratique, les résultats de la chirurgie sont d’autant plus favorables que l’intervention est décidée au bon moment, c’est-à-dire dès l’apparition d’une rétraction interphalangienne non corrigée par l’aponévrotomie.
Le piège essentiel étant de se satisfaire d’un gain d’extension palmaire au détriment de la persistance ou de l’aggravation d’une rétraction digitale qui rendrait le pronostic global très compromis du fait de la raideur qu’à moyen terme elle impose.
L’intérêt théorique du traitement chirurgical de Dupuytren est sinon d’enlever le tissu rétractile au lieu simplement de le sectionner. L’objectif de l’intervention est de réduire ainsi la vitesse et la fréquence de la récidive de la maladie en supprimant le plus possible de tissu malade. Ce rôle préventif est amélioré en cas de remplacement de la peau pathologique par une greffe de peau totale.
Les principaux écueils du traitement chirurgical restent les raideurs articulaires post-opératoires en rapport soit avec un important enraidissement articulaire préopératoire soit avec la survenue d’un syndrome algodystrophique post-opératoire non exceptionnel.
L'aponévrectomie : La résection d'une bride de Dupuytren
L’intervention chirurgicale nécessite une voie d‘abord sur toute l’étendue de la corde rétractile, allant souvent de la moitié de la paume de la main jusqu’en dessous de l’interphalangienne proximale du ou des doigts concernés. Pour ne pas générer de bride cicatricielle post-opératoire, cet abord doit se faire sans croiser les plis de flexion des doigts et donc le plus souvent en zigzag ou en quinconce.
On expose ainsi pour chaque doigt touché par la maladie la totalité de l’aponévrose atteinte que l’on enlève (c’est la définition de l’aponévrectomie). Le chirurgien prend soin de ne pas léser les pédicules vasculo-nerveux qui peuvent soit avoir un trajet normal rendant la dissection en général aisée, soit surcroiser la bride. Lorsque celle-ci s’est mise en tension après s’être initialement enroulée autour du pédicule, la bride entraine alors une modification du trajet du pédicule qui devient alors désaxé et superficiel et ainsi plus exposé à une éventuelle blessure chirurgicale.
La bride de Dupuytren une fois réséquée, on obtient en général pour les formes opérées par aponévrectomie dans des délais adaptés une extension digitale complète. Cette extension du doigt permet de terminer l’intervention par une fermeture cutanée qui peut être soit complète, soit partielle. Il est en effet parfois intéressant de laisser une zone cutanée sans suture pour qu’elle se referme toute seule, ce qui se fait en une quinzaine de jours et avec une belle cicatrice.
Cette technique décrite par Mac Cash permet de limiter le risque d’hématome post-opératoire. Elle donne de l’aisance au chirurgien de la main pour éviter des sutures sous tension quand le gain d’extension est important et la peau peu élastique.
Un risque de récidive toujours possible
Cependant, pour des formes d’évolution anciennes ou sévères de la maladie de Dupuytren, il persiste fréquemment une limitation de l’extension digitale nécessitant un geste de libération articulaire (d’arthrolyse) complémentaire qui alourdit le protocole chirurgical. Le but de l’aponévrectomie est en enlevant le maximum de tissu pathologique de limiter au mieux les risques de poursuite évolutive de la maladie rétractile, voire d’obtenir une guérison par la suppression définitive de l’ensemble du tissu rétracté.
Malheureusement les récidives sont malgré tout possibles avec une opération de Dupuytren par aponévrectomie. Elles dépendent en fait beaucoup plus de la sévérité de l’atteinte et du contexte propre à chaque patient que de la qualité du geste d’exérèse.
Les différentes opérations pouvant être associées à l'enlèvement des cordes de Dupuytren
La libération articulaire dans la maladie de Dupuytren (arthrolyse)
La libération articulaire appelé arthrolyse est parfois réalisée en plus de la suppression du tissu de Dupuytren. Elle concerne principalement les interphalangiennes proximales (IPP) et plus rarement distales (IPD), que les métacarpo-phalangiennes (MP) qui dans cette pathologie s’enraidissent peu.
L’arthrolyse libère en les décollant ou les sectionnant les tissus péri-articulaires rétractés. Cette libération ne redonne pas aux tissus l’élasticité qui serait nécessaire à leur bon fonctionnement mais libère les amplitudes au prix d’une agression tissulaire qui alourdit notablement les suites opératoires.
Cette opération de Dupuytren expose à une récidive de la raideur par le biais de la cicatrisation qui en découle. Cependant, pour une raideur articulaire initiale importante, l’arthrolyse reste la seule solution pour permette de récupérer une extension digitale correcte tout en témoignant d’une atteinte évolutive sévère et donc d’un pronostic de récupération moins favorable.
Deux types d’arthrolyses sont envisageables :
- Les arthrolyses extra articulaires, peu agressives, de réalisation facile avec des suites opératoires simples,
- Les arthrolyses articulaires, très agressives mais parfois nécessaires.
Les arthrolyses articulaires ont des résultats nettement moins satisfaisants. Après l’obtention d’une extension digitale initiale correcte après opération, ces résultats sont souvent marqués par la réapparition en quelques semaines d’une rétraction digitale parfois aussi importante qu’au départ, avec un risque de limitation également de la flexion. Il faut alors lutter contre cette rétraction du doigt par une rééducation post-opératoire sérieuse et prolongée, fréquemment associée au port intermittent d’orthèses dynamiques d’extension (élastiques ou ressorts fixés a une attelle et tractant les doigts).
Les ténolyses et les allongements tendineux
Les libérations et allongements tendineux, appelés en chirurgie ténolyses du doigt, permettent de redonner la longueur à des structures tendino-musculaires. Dans le cadre de la maladie de Dupuytren, c’est une chirurgie itérative rarement nécessaire en cas de rétraction consécutive à une évolution prolongée sévère ou d’adhérences post-opératoires.
Les allongements de l’appareil extenseur au dos de la deuxième phalange sont également très intéressants. Grâce à l’intervention chirurgicale, Ils corrigent une hyper-extension du bout du doigt dans le cadre de déformations dite en boutonnière, fréquente lors de l’évolution digitale de la maladie de Dupuytren. Ces déformations en boutonnière rendent d’ailleurs le pronostic des traitements chirurgicaux beaucoup plus défavorable.
La greffe de peau et les lambeaux dans la maladie de Dupuytren
Ceux sont deux procédés de remplacement de la peau atteinte par une peau saine qui visent à :
- D’une part avoir une bonne couverture cutanée par une peau de meilleure qualité mécanique que la peau malade accompagnant souvent les formes récidivantes,
- D’autre part essayer d’enrayer le processus évolutif en limitant les points de départ d’une reprise évolutive de la maladie selon un procédé proche du « coupe-feu ».
Les lambeaux de peau sont prélevés en général au voisinage immédiat de la zone réséquée. Ils ont l’avantage d’apporter un tissu vascularisé et bien étoffé mais en imposant de faire cicatriser la zone donneuse ce qui rend leur utilisation plus compliqué et plus rare. On préfère le plus souvent les greffes de peau pour une opération de Dupuytren. Elles sont souvent prélevées au niveau de la face interne de l’avant-bras, laissant très peu de trace avec une petite cicatrice longitudinale de 5 cm environ peu visible.
Pour ces deux interventions chirurgicales, une anesthésie locorégionale suffit. Les résultats fonctionnels et esthétiques sont satisfaisants. L’utilisation d’une greffe de peau (ou d’un lambeau) limite considérablement les risques de récidive dans la maladie de Dupuytren.
La distraction continue par fixateur externe
La distraction par fixateur est une technique opératoire décrite pour certaines formes sévères de Dupuytren. Elle consiste à fixer chirurgicalement un appareil métallique externe dans les phalanges du doigt. On l’étend petit à petit pour récupérer de l’extension en vue d’un traitement chirurgical ultérieur par aponévrectomie dans des conditions techniques plus simples et sécurisantes.
Ce procédé long et contraignant est très rarement utilisé pour soigner la maladie de Dupuytren.
L’arthrodèse du doigt
L’arthrodèse de doigt est une solution de sauvetage très intéressante qui permet de sortir des pires situations.
Cette opération dans la maladie de Dupuytren consiste à fusionner définitivement l’articulation enraidie (en général l’IPP) en position vicieuse (doigt en crochet) dans la position choisie. Dans les cas les plus désespérés, elle permet de désenclaver un doigt de la paume. Cette chirurgie du doigt assez simple est réalisée par un abord dorsal en zone non dangereuse qui permet d’éviter une dissection dans la zone palmaire digitale. Il faut en effet prendre en compte les risques vasculo-nerveux pour les patients multi-opérés n’ayant de ce fait plus qu’une vascularisation et une innervation précaire.
L’arthrodèse positionne le doigt dans un secteur fonctionnel. En ouvrant l’accès à la paume, elle redonne au patient un confort et une fonction correcte, notamment pour des gestes simples comme attraper et maintenir des objets dans la main, enfiler des gants, se laver le visage. La perte de flexion active de l’IPP fait perdre une partie de la force de serrage, surtout lorsqu’elle concerne le cinquième doigt. Mais cette force n’est, en général avant l’intervention, pas exploitable du fait de l’importance de la rétraction digitale nécessaire pour justifier le choix de l’arthrodèse.
L’arthrodèse du doigt permet d’éviter la quasi-totalité des amputations.
L'amputation pour maladie de Dupuytren, une chirurgie extrême
A cause de la maladie de Dupuytren, l’amputation du doigt est parfois demandée par les patients :
- Pour des formes très rétractées et douloureuses lorsque le doigt par sa rétraction gène la fonction des doigts voisins,
- Parce qu’il est devenu douloureux à force de rétraction et de traitements successifs pour les cas les plus complexes et désespérants.
Cette chirurgie pour Dupuytren est assez pratiquée pour les formes graves dans certains pays. Elle doit au maximum être évitée au profit des arthrodèses, sauf dans les cas de séquelles cicatricielles douloureuses.
Ce traitement chirurgical provoque la constitution de névromes d’amputation (nerf coupé très sensible) sur la zone de coupe des deux nerfs collatéraux. Elle ne permet pas toujours d’assurer l’indolence après l’opération.
Complications après une opération de Dupuytren
C’est une chirurgie exigeante et aux résultats aléatoires. La récidive après une opération de Dupuytren est toujours possible et relativement fréquente. Cette fréquence est très atténuée par la mise en place d’une greffe de peau.
Les complications sont exceptionnelles en cas de maladie Dupuytren simple, surtout en cas de première intervention.
Les complications post-opératoires sont le fait des hématomes, des infections, des lésions de pédicules vasculo-nerveux ou des enraidissements articulaires post-opératoires. Elles surviennent principalement pour des formes d’emblée sévères ou traitées à de multiples reprises, que ce soit par aponévrotomie ou aponévrectomie avec dans les deux cas, de possibles fragilisations de la peau et des pédicules vasculo-nerveux qui augmentent le risque de nécrose cutanée ou digitale.
En outre, un important gain d’extension sur des pédicules vasculo-nerveux fragilisés peut provoquer, par l’étirement qu’il impose, des troubles sensitifs ou ischémiques du doigt. L’ensemble de ces complications possibles après une opération de Dupuytren doit être détaillé aux patients au vu des impératifs médico-légaux actuels.
L'algodystrophie
Le risque d’algodystrophie reste la complication la plus difficile à appréhender. Contrairement aux autres complications post-opératoires, l’algodystrophie n’est pas en relation avec la sévérité de l’atteinte de Dupuytren ou la qualité de l’intervention. C’est en fait le terrain personnel du patient qui joue le plus et ce risque reste non exceptionnel dans la chirurgie de Dupuytren (environ 10% des cas), surtout pour les femmes qui seraient atteintes huit fois plus que les hommes (1).
L’algodystrophie, par la gêne à la rééducation qu’elle impose, va altérer considérablement le gain d’extension obtenu. Outre le résultat médiocre qu’elle entraîne, elle va limiter les possibilités de reprise chirurgicale ultérieure rendant pour ces patients le pronostic final de la Dupuytren particulièrement médiocre.